L’odontologie médico-légale est une branche de la médecine légale qui s’intéresse à l’étude des dents et des maxillaires. Cette discipline participe à l’identification des personnes découvertes mortes d’identité inconnue, ou pour lesquelles une identification visuelle par les proches ou par les empreintes digitales est impossible.
Quel que soit l’époque, la nature de la mort, l’identification d’une personne décédée revêt une importance particulière. Elle est aussi une manière d’accepter le deuil pour la famille des victimes. Auparavant, l’identification n’était réalisée que visuellement par les proches de la victime pouvant induire des risques d’erreurs liés au contexte. Aujourd’hui, les caractéristiques bucco-dentaires constituent un élément d’identification à part entière. Avant que l’empreinte génétique ne vienne la supplanter, l’analyse bucco-dentaire représentait ainsi 80% des identifications difficiles lors des grandes catastrophes (accidents d’avion, tsunami…), rappelle l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN).
L’odontologie médico-légale est pratiquée par un expert odontologiste. C’est un auxiliaire de justice qui intervient – indifféremment que la cause de la mort soit naturelle ou suspecte – dans plusieurs cas :
– L’identification des cadavres dans un contexte de catastrophe de masse
– L’identification des cadavres unitaires
– L’étude de traces de morsures portées par une victime, vivante ou décédée
– Dans les cas de maltraitance
– De déterminations de l’âge et du sexe
– Dans la réparation juridique du dommage dentaire et la responsabilité médicale.
L’intérêt d’utiliser les dents en identification est d’autant plus important que la dégradation du corps de la victime est grande, rendant impossible les techniques traditionnelles d’identification (empreintes digitales et prélèvements ADN).
La structure et les caractéristiques des dents et des mâchoires humaines sont uniques, tout comme les empreintes digitales. Par conséquent, chaque individu possède une véritable carte d’identité en bouche, c’est pour cela qu’on parle d’unicité de la denture. Ces critères dentaires sont ainsi utilisés pour une identification formelle.
De plus, les dents, et l’émail en particulier, sont les éléments tissulaires du corps humain qui résistent le mieux au temps, mais aussi à plusieurs facteurs de destruction tels que l’enfouissement, la crémation, l’immersion en eau douce ou en eau salée, la putréfaction ainsi qu’aux atteintes physico-chimiques. C’est pourquoi elles se révèlent être un bon élément d’identification de l’identité d’une personne.
On distingue deux cas de figure en identification odontologique :
– L’identification estimative, qui est réalisée lorsque les éléments de l’enquête n’apportent aucune identité ni aucun dossier de comparaison dentaire. Elle permet ainsi d’orienter l’enquête sur un individu disparu. En étudiant les dents avec des techniques de mesures ou visuelles, on peut réussir à estimer l’âge, le sexe et parfois le groupe biologique ou l’appartenance à une ethnie particulière. Elle peut également renseigner sur un niveau social, des habitudes alimentaires, donner une indication de métier ou dire si la personne était droitière ou gauchère. Une fois les examens réalisés, un odontogramme post mortem (schéma dentaire) est effectué, relatant l’ensemble des dents présentes, absentes, traitées (en relevant les matériaux d’obturation présents sur les différentes faces des dents) ainsi que les prothèses dentaires adjointes ou conjointes.
– L’identification comparative va comparer les données ante mortem et post mortem. Cela sous-entend que les éléments de l’enquête donnent une identité connue. Des données dentaires post-mortem relevées sur le cadavre ou sur les restes dentaires, sont comparées à un catalogue de supports tels que le dossier dentaire ante-mortem, les radiographies (panoramiques ou rétro alvéolaires) ou les moulages dentaires de la victime.
Cette comparaison est effectuée sur la spécificité d’éléments identifiants chez un individu comme les prothèses dentaires, les soins, le traitement des canaux radiculaires, la présence d’implants… Même si l’individu n’a jamais subi de soins dentaires, il est possible de pourvoir l’identifier à partir de la morphologie de ses racines dentaires. La comparaison des odontogrammes ante et post mortem aboutit dans de très nombreux cas à l’identification formelle d’un individu…
Peggy Cardin-Changizi