Concernant une certaine influence génétique sur la santé dentaire, les scientifiques ne sont pas tous d’accord. Si certaines études affirment qu’il n’existe aucun lien entre les facteurs génétiques et la formation des caries et que seules les règles d’hygiène interviennent, d’autres au contraire, assurent que la génétique joue un rôle significatif.
Faut-il le rappeler, la consommation excessive de sucres et une mauvaise hygiène bucco-dentaire constituent les deux principales causes de caries dentaires. Mais malheureusement, nous ne sommes pas tous égaux face à cette maladie infectieuse qui touche, selon les estimations, plus de 2 milliards de personnes dans le monde. En effet, certains individus ont davantage tendance à développer des caries que d’autres malgré leurs efforts en matière d’hygiène bucco-dentaire. Dès lors, on pourrait logiquement se demander s’il n’existerait pas une certaine influence génétique sur la santé dentaire, qui rendrait certains sujets plus vulnérables que d’autres.
Des facteurs environnementaux en cause
Pour les scientifiques du Murdoch Children’s Research Institute (Australie), la génétique ne prédispose pas à la carie. Dans une étude parue dans la revue Pediatrics, les chercheurs, qui ont étudié 173 paires de jumeaux homozygotes et hétérozygotes (vrais jumeaux et faux jumeaux) suivis depuis la grossesse jusqu’à l’âge de 6 ans, ont ainsi rapporté les résultats suivants : 32,2 % des enfants avaient au moins une carie à 6 ans dont 24,1 % étaient à un stade avancé. Les résultats ont montré que les « vrais » jumeaux, qui ont des génomes identiques, avaient une santé bucco-dentaire variable, avec des caries de différents degrés de sévérité, ce qui suggère que les facteurs environnementaux (hygiène bucco-dentaire) sont en cause. L’étude établit par ailleurs un lien direct entre la santé de la mère, son mode de vie pendant la grossesse, et la santé bucco-dentaire de l’enfant plus tard : l’obésité pendant la grossesse étant un « marqueur certain » du risque accru de carie dentaire chez l’enfant. Dans un communiqué, Mihiri Silva, principale auteure de cette recherche, évoque deux hypothèses pour expliquer le lien entre l’obésité maternelle et la santé bucco-dentaire de l’enfant : la première est que le poids de la mère influence le développement du fœtus ; la seconde hypothèse serait que le risque de carie augmente à cause d’une consommation accrue de sucre dans la famille.
Impact du gène AMELX
Une autre étude publiée dans la revue scientifique « PLOS One » vient contredire les conclusions de l’équipe australienne. Des scientifiques ont cette fois-ci mesuré l’impact du gène AMELX sur la cariosusceptibilité (susceptibilité de développer des caries) des dents. Pour cela, ils se sont intéressés au taux d’amélogénine (protéine essentielle au développement des dents et à la formation de l’émail dentaire) synthétisée grâce à ce gène. Cette étude a conclu que plus le taux de synthèse d’amélogénine synthétisée est important (par surexpression du gène AMELX), plus l’émail dentaire formé est résistant aux attaques acides, ce qui rendra les dents moins sujettes aux caries.
Tandis qu’un faible taux du gène AMELX sera responsable de la formation d’un émail fragile et vulnérable aux attaques acides des bactéries buccales à l’origine des caries. Des variations du gène AMELX peuvent ainsi entraîner des anomalies de formation de l’émail et donc un risque accru de formation de caries. Des actions de prévention pourraient être proposées aux patients présentant un profil génétique « à risque ».
Même s’il existe une certaine influence des facteurs génétiques dans la formation des caries, l’hygiène bucco-dentaire et l’alimentation, restent les premiers responsables de celles-ci. Donc l’« immunité génétique aux caries », c’est pas automatique !
Peggy Cardin-Changizi